LE LAOS EN 2001 INTROVERSION POLITIQUE ET SURSIS ÉCONOMIQUE Yves Bourdet Département de sciences économiques Université de Lund S-220 07 Lund Suède Reprinted from Asian Survey, Vol. 42 (2002), No. 1, pp. 107-114, by permission of the Regents of the University of California. Pour le Laos, 2001 a été une année d'introversion politique centrée sur les préparatifs longs et ardus du congrès quinquennal du «Parti Révolutionnaire Populaire Lao» (PRPL). Comme dans les autres pays communistes dotés d’un système politique à parti unique, le congrès du Parti constitue l'événement politique le plus important du pays, notamment parce qu'il règle la lutte politique interne et sanctionne la nouvelle répartition du pouvoir entre personnes, factions et provinces. Le congrès du parti fournit aussi des indications sur la stratégie économique à long terme du gouvernement de par l’étroite imbrication de celui-ci avec le PRPL. Les préparatifs du Septième Congrès du Parti ont duré plusieurs mois, pendant lesquels les signes de dissensions internes se sont multipliés. Deux facteurs en particulier ont eu un impact tant sur le cours que sur les résultats du congrès. D'abord, une mystérieuse campagne d’attentats à la bombe a frappé le pays en 2000. Aucune arrestation n'a été opérée en relation avec les attentats, et les motivations politiques de leurs auteurs sont restés floues, même si quelques sources officieuses ont rapproché la campagne de la lutte entre diverses factions au sein du PRPL. Deuxièmement, le gouvernement a été la cible de nombreuses critiques internes et externes pour son incapacité à faire face aux effets de la crise économique asiatique. On l'a vu inefficace dans la gestion de l'économie et de l'utilisation la meilleure pour la croissance de l'énorme aide étrangère (environ 20 % du produit intérieur brut ) reçue par le pays. Le Septième Congrès du Parti : aveux sans concessions Le Septième Congrès du Parti s’est ouvert dans le Centre Culturel à Vientiane en mars 2001. Il y avait 452 délégués en place pour représenter environ 100.000 membres du Parti, soit moins de 2 % de la population. Les représentants des autres membres de l’internationale communiste – Viêt-nam, Chine, Cuba et Corée du Nord - aussi bien que de quelques pays voisins, étaient présents. Le congrès, qui avait été précédé de discussions approfondies et secrètes au sein du leadership du PRPL, a duré seulement trois jours. De strictes mesures de sécurité l’ont entouré suite à la vague de mystérieux attentats commis l'année précédente. Mettre en perspective historique le Septième Congrès du Parti permet une meilleure compréhension de ses principales préoccupations et de ses résultats. Le Quatrième Congrès du Parti en 1986 lança un ambitieux programme de réformes économiques appelé le Nouveau Mécanisme Économique. Sa principale raison d’être était l'échec évident de la stratégie socialiste pour améliorer le niveau de vie de la population. Le Cinquième Congrès du Parti en 1991 fut consacré à la consolidation des réformes économiques. La crainte d’une perte de contrôle sur ces réformes et sur les suivantes, ainsi que celle des conséquences politiques possibles de la libéralisation économique ont dominé le Sixième Congrès du Parti. Ce dernier a renforcé le pouvoir des réformateurs «par nécessité» aux dépens des réformateurs «par conviction» comme en témoigne la présence accrue de l'Armée Populaire Lao au sommet du pouvoir, avec sept des neuf membres du Politburo étant ou ayant été membres de l’armée. Le dérapage macro-économique suite à la crise financière asiatique et l'opposition politique ravivée à l'intérieur, mais surtout à l'extérieur du pays, ont pesé fortement sur les travaux préparatoires du Septième Congrès du Parti. La réponse du PRPL à ces défis est révélatrice des préférences de son leadership. Le congrès a décidé des changements négligeables dans la composition du Politburo et du Comité Central et a introduit un nouveau règlement qui limite à deux mandats l’occupation des postes administratifs, tout cela pour se concilier la jeune génération. Le congrès a également fait des promesses timides de réformes économiques favorables à l’économie de marché et de meilleure gouvernance afin d'apaiser la communauté des donateurs, qui finance 80 % des investissements publics consacrés au développement économique au Laos. Mais après la campagne longue et ardue menant au Septième Congrès du Parti, les changements qu’il a approuvés dans le leadership se sont avérés être un peu un échec. La vieille garde a maintenu son emprise sur le pouvoir avec le Président Khamtay Siphandone, 77 ans, l’un des derniers survivants du Parti Communiste Indochinois fondé par Ho Chi Minh dans les années 30, conservant le poste de Président du Parti. Les sept autres membres du Politburo ont conservé leurs places (le neuvième membre, le Vice-président Oudom Khattigna, est mort en décembre 2000). Cependant, deux nouveaux sièges ont été créés au Politburo, faisant passer son nombre de 9 à 11 membres. Le changement a rajeuni quelque peu le leadership, mais il n’est pas un signe de renouvellement idéologique. Deux des trois nouveaux venus, Thongloun Sisoulith et Bouasone Bouphavanh, ont été formés au Viêt-nam et en URSS et le troisième, Douangchai Phichit, était le chef d’état-major de l’armée. De la même manière, le Comité Central est passé de 49 à 53 sièges (dont trois femmes) afin d’intégrer des cadres du parti plus jeunes. L'âge moyen du Comité Central reste, cependant, plutôt élevé à 56 ans. Il comprend tous les 16 gouverneurs provinciaux, probablement pour s’assurer d’un meilleur contrôle des activités des provinces maintenant qu’une plus large autonomie financière et économique leur a été accordée. Le gouvernement a été remanié à la fin de mars pour refléter le changement dans la hiérarchie du parti approuvée par le Congrès et la forte intégration entre le PRPL et l'appareil d’État au Laos. Le premier changement a concerné la nomination de l’ancien ministre des Finances et numéro six dans la hiérarchie du parti, Bounnyang Vorachit, au poste de Premier ministre à la place du Général vieillissant Sisavath Keobounphanh, tenu pour responsable de l'échec de la politique économique de la fin des années 1990. Bounnyang est un ancien colonel d'armée avec une expérience administrative comme gouverneur de la province de Savannakhet et maire de Vientiane. Son choix semble avoir été le résultat d'un compromis entre la faction militaire menée par Khamtay et l'aile plus idéologique conduite par l'ancien président et actuel conseiller du parti Nouhak Phoumsavanh, 85 ans seul membre restant du premier gouvernement de résistance en 1950. [1] D'autres décisions clefs ont été la nomination de Soukanh Mahalath, l'ancien gouverneur de la banque centrale, au poste de ministre des Finances, celui du nouveau membre de Politburo le général Duoangchay Phichit au poste de ministre de la Défense Nationale, et la désignation du Ministre des Affaires étrangères Somsavat Lengsavat comme Vice-Premier ministre. Somsavat n'a pas été élu au Politburo et son poids dans les questions de politique étrangère va probablement être affaibli par l'élection de Thongloun Sisoulith, l'ancien président de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, au Politburo (et maintenant numéro neuf dans la hiérarchie du parti) et sa désignation comme Vice-Premier ministre responsable du Comité d’État du Plan. Pendant le Septième Congrès du Parti une sorte d'atmosphère schizophrène a prévalu à Vientiane, avec des drapeaux rouges avec marteau et faucille partout à travers la ville, contrastant avec la renonciation aux principes économiques d’inspiration communiste à l'intérieur du Congrès. Dans son rapport politique aux délégués, le Président du Parti Khamtay Siphandone s'est référé explicitement au socialisme et a souligné que le parti adhère toujours au marxisme-léninisme. Cela, cependant, n'a eu aucune influence sur le nouveau plan économique quinquennal (2001-2005) présenté au congrès. Dans son discours, Khamtay a avoué que des facteurs domestiques avaient joué un rôle important dans l'instabilité macro-économique et financière qui a frappé le pays à la fin des années 1990. Le manque de personnel qualifié, une politique monétaire laxiste et la corruption parmi des fonctionnaires étaient les problèmes, a-t-il dit. Pendant la période 2001-2005, le gouvernement table sur une croissance moyenne d'au moins 7 %. La stratégie de développement nécessaire pour réaliser cet objectif est plutôt vague, cependant. L'accent est placé sur la poursuite des réformes favorisant l’économie de marché (sans entrer dans les détails), le développement du secteur privé, la mobilisation des ressources humaines, des infrastructures routières améliorées et la fin de pratiques culturales sur brûlis dans l'agriculture. Cet objectif de croissance est optimiste pour une raison principale : l'économie Lao est surtout agricole (l'agriculture représente environ la moitié du produit intérieur brut) et en majeure partie une agriculture de subsistance laquelle par nature ne connaît pas de croissance ou croit fort lentement. Le congrès s’est fixé deux autres objectifs économiques. Le premier est de tripler le revenu par habitant à l’horizon 2020, tandis que le deuxième est de supprimer la pauvreté avant 2020 après l'avoir diminué de moitié avant 2005. [2] Les deux objectifs sont quelque peu irréalistes étant donné la croissance démographique rapide du pays, environ 2.8 % par an ; à ce taux, la population doublera avant 2025. De plus, la répartition de la croissance par secteurs, concentrée sur l'industrie et les services, rend l'accomplissement du deuxième objectif d'autant moins probable. La pauvreté est principalement un phénomène rural au Laos, et la hausse de la croissance et de la productivité en région rurale se heurte à de fortes contraintes telles que les insuffisances de l'éducation de base, du système de santé et du niveau nutritionnel, qui peuvent seulement être surmontées dans le long terme. Répit dans l'instabilité économique L'économie Lao a poursuivi son rétablissement en 2001 après la crise sévère qui frappa le pays dans les années 1997-99. Deux facteurs ont contribué à la très forte instabilité macro-économique à la fin des années 1990 et au fait que le Laos a été affecté plus sévèrement que les pays qui l’entourent par la crise asiatique : une politique monétaire laxiste et la quasi-insolvabilité des banques commerciales publiques du fait du volume important de créances non recouvrables. La politique monétaire laxiste est due au lancement d'un programme d'irrigation sur une très grande échelle financé par la banque centrale Lao. Khamtay a préconisé le programme d'irrigation afin de réaliser l'autosuffisance alimentaire (surtout pour ce qui est le riz) au Laos. [3] Quant à la quasi-faillite du système bancaire (qui est sans chance de rétablissement sans recapitalisation par l'État), les problèmes sont dus à la permanence de contraintes budgétaires molles (soft budget constraint) dans le secteur bancaire. On avait accordé un nombre important de prêts sur des bases non-économiques (le plus souvent politiques) aux entreprises publiques et militaires et à des particuliers ayant des liens étroits avec le PRPL. Pour faire face à ces deux facteurs, le gouvernement Lao, avec l'aide des organisations multilatérales, le Fonds monétaire international (le FMI) et la Banque de Développement Asiatique (ADB) en particulier, a mis un terme au financement monétaire du déficit budgétaire et recapitalisé (et restructuré) les banques commerciales publiques. L’amélioration de la situation macro-économique au Laos pendant les deux dernières années est du à cela. Cependant, les facteurs institutionnels et structurels sous-jacents à l'instabilité financière et monétaire sont toujours en place. La banque centrale Lao et les banques commerciales publiques n’ont qu’une autonomie limitée par rapport au gouvernement Lao et indirectement au PRPL. Il est important d’ajouter que l'impact négatif de considérations politiques dans la conduite de la politique monétaire et de la politique de prêt des banques commerciales est renforcé par le manque de transparence du système financier Lao et celui des transactions d'affaires en général. Ceci est particulièrement vrai s’agissant des entreprises militaires. Tant que les causes sous-jacentes ne seront pas combattues d'une façon plus systémique, on peut considérer que l’amélioration de la situation économique au Laos n’est qu’un répit, et que l’instabilité macro-économique peut refaire surface à tout moment. En 2001, l'inflation a continué à diminuer et a été évaluée à environ 10 % (à comparer avec 27 % et 134 % en 2000 et 1999, respectivement). L'inflation au Laos était toujours plus élevée que celle des partenaires commerciaux du pays, ce qui explique la nouvelle dépréciation de la monnaie Lao, le kip, en 2001. Entre fin 2000 et fin 2001, le kip s’est déprécié d’environ 15 % par rapport au dollar américain. Une autre illustration du rétablissement macro-économique est l'amélioration de la situation budgétaire. L’augmentation des recettes fiscales a fait baisser le déficit budgétaire (en excluant les dons) de 10 % du produit intérieur brut au cours de l’année fiscale octobre/septembre 1998/99 à environ 8 % au cours de la période correspondante en 2000/01. L’aide étrangère et des prêts externes avantageux financent le déficit. La croissance économique au Laos est largement déconnectée de l'instabilité macro-économique à cause du rôle prédominant de l’agriculture de subsistance. Les statistiques officielles chiffrent la croissance du produit intérieur brut à 5.9 % en 2000, et les évaluations préliminaires pour 2001 sont du même ordre de grandeur, 6 %. L'impact sur la croissance au Laos des attaques du 11 septembre et du ralentissement de l’activité économique des pays industriels devrait être négligeable. Une croissance plus forte a été réalisée dans les services et l'industrie, entre 6 % et 8 %. Les statistiques officielles au Laos ont tendance à surestimer la croissance agricole (voir ci-dessus) et à sous-estimer la croissance de l’industrie et des services en mesurant de manière très imparfaite la croissance des activités informelles, particulièrement dans Vientiane et les autres grandes villes. Une implication en est que le différentiel de croissance entre l'agriculture et l'industrie et les services est plus grand que dans les statistiques officielles. Cela est évident quand on regarde les changements dans la pauvreté au Laos. En réalité, la pauvreté a diminué beaucoup plus rapidement dans la Municipalité de Vientiane, où l'industrie et les services sont concentrés, que dans les régions principalement agricoles et les provinces. Entre le début et la fin des années 1990 la proportion des gens vivant dans la pauvreté a diminué de 24 % à 12 % de la population dans la Municipalité de Vientiane, tandis qu'elle a seulement diminué de 58 % à 53 % dans la région du nord et de 40 % à 35 % dans la région centrale. La plus mauvaise situation est celle des provinces d'Oudomxay et Huoa Phanh dans le nord du Laos où pas moins de trois habitants sur quatre vivent dans la pauvreté. [4] Vietnamisation croissante et passivité des pays donateurs Le Septième Congrès du Parti a été précédé par une lutte interne au sein du PRPL, ce qui, selon des sources officieuses, était dû à l'opposition à la vieille garde pro-vietnamienne d'une faction plus jeune inclinant vers la Chine. Les résultats du congrès ne viennent que faiblement à l'appui de cette hypothèse. Le partisan principal de la faction plus jeune, le Ministre des Affaires Étrangères Somsavat Lengsawat, n'a pas été élu au Politburo, mais a gardé sa position au Comité Central et est resté Ministre des Affaires Étrangères. D'autre part, les nouveaux venus dans le Politburo ont de fortes attaches avec le Viêt-nam, où ils ont été formés. L'année passée a vu une extension du rôle du Viêt-nam dans les affaires du Laos ; après avoir quasi-exclusivement concerné les questions politiques et militaires, il couvre maintenant l'éducation, la justice, les médias, les syndicats, les opérations de banque, le commerce, l'agriculture, les infrastructures de transport, et ainsi de suite. On ne peut remarquer aucun accroissement semblable dans l'aide de la Chine, qui a certainement augmenté, mais est restée limitée aux questions économiques et commerciales. L'intensification forte et multiforme de l'aide vietnamienne au Laos vaut d'autant plus la peine d’être notée que le Viêt-nam lui-même est un grand bénéficiaire de l'aide étrangère, en particulier de la part de l'Europe occidentale et de l'Australie. C'est une illustration de la fongibilité internationale, quand une aide occidentale accrue au Viêt-nam libère des ressources intérieures qui peuvent être utilisées pour étendre l'influence du Viêt-nam au Laos. [5] Une autre dimension principale de la politique étrangère Lao concerne sa relation avec la communauté des donateurs. Les institutions de Bretton Woods, le FMI et la Banque mondiale, ont repris leur aide parallèlement à l'amélioration de la situation macro-économique au Laos. Le FMI, par exemple, a accordé un nouveau prêt de trois ans d’un montant de 40 millions de dollar en avril 2001, soit huit ans après le dernier prêt accordé au Laos en 1993 et a fourni au pays une assistance technique. L'ADB a aussi augmenté ses engagements au Laos, lançant un ambitieux programme de lutte contre la pauvreté avec un accent particulier sur l'éducation primaire, le développement du secteur privé et les provinces du nord. [6] La promesse du gouvernement Lao de meilleure gouvernance et transparence, par exemple pendant la Septième Table Ronde de Vientiane à la fin de novembre 2000, a contribué à ce changement d’attitude des organisations multilatérales. Néanmoins, les signes réels d’amélioration de la gouvernance sont rares. De plus, la politique du gouvernement vis à vis des médias locaux s'est raidie pour empêcher des journalistes de donner "des informations fausses sur le Laos au monde". Deux événements ont illustré les limites des promesses du gouvernement et l’absence d'un système légal vraiment indépendant et libre des pressions politiques. Le premier événement a concerné deux Australiens qui ont été détenus pendant 10 mois sur allégations de vol de pierres précieuses (valant 500.000 dollars) dans la société pour laquelle ils travaillaient, la Gem Mining Lao (GML). Les deux ont nié les charges, mais ont été condamnés à sept années de prison avec des amendes et le paiement d’une caution d’1 million de dollars après un procès bâclé. Les pressions diplomatiques de l'Australie (le quatrième donateur bilatéral au Laos) leur ont permis de bénéficier d'une grâce présidentielle qui leur a permis de retourner en Australie en novembre 2001. Derrière l'épisode judiciaire s’est déroulée une lutte pour le contrôle de la mine de saphir GML opposant des membres influents du gouvernement Lao aux propriétaires étrangers qui s'étaient enfuis du pays en 1999. Les deux Australiens ont en fait été retenus pour permettre d'appréhender les propriétaires étrangers de la société. Le deuxième événement, à caractère politique est survenu le 26 octobre 2001, quand cinq activistes politiques européens (dont l’un était membre du Parlement européen) ont été arrêtés après une manifestation devant le palais présidentiel de Vientiane pour l'établissement du pluripartisme et le respect des droits de l'homme. La manifestation a marqué le deuxième anniversaire de la disparition d'un groupe d'étudiants Lao, qui avaient manifesté pour des raisons semblables à la même place en 1999. Le Président du Parlement européen, Nicole Fontaine, a vigoureusement condamné la détention des activistes "comme une infraction aux droits fondamentaux de l'homme et de l'accord de coopération du Laos avec l'UE [l'Union Européenne]”, et le Comité des Affaires Étrangères du Parlement Européen a menacé de suspendre l'accord de coopération et de geler tous les fonds destinés au Laos. Romano Prodi, président de la Commission européenne, a exprimé des soucis analogues. Après deux semaines de prison, les cinq ont été reconnus coupables "d’infraction à la loi Lao, menaçant la stabilité politique Lao et la vie paisible du peuple", condamnés à deux ans de prison et finalement expulsés du Laos. Il est curieux de voir que ces deux événements n'ont pas affecté l'aide au Laos des pays concernés, qui couvre la majeure partie des dépenses de développement au Laos. Pendant 2001, certains pays de l’UE non seulement ont renouvelé mais aussi accru leur aide au Laos. Conclusion Le Septième Congrès du PRPL n’a pas répondu aux attentes de ceux qui espéraient une ouverture du système politique et l’émergence d’une nouvelle élite politique au Laos. Seuls des changements mineurs ont émané du congrès du parti, et des changements mineurs dans les relations entre le Laos et les pays avoisinants. D'autre part, la situation macro-économique a continué à se stabiliser avec l'aide de la communauté internationale, mais peu a été fait pour agir sur les déterminants structurels et institutionnels de l’instabilité macro-économique et monétaire. La croissance a continué à être déséquilibrée, favorisant les zones urbaines où l'industrie et les services sont concentrés. Seules des améliorations minimes ont eu lieu dans la gouvernance, ce qui signifie que l'impact positif de l'énorme aide étrangère sur la croissance économique et le développement a continué à être contrarié par la mauvaise qualité des interventions étatiques et de la politique de développement.
[1] Le choix du nouveau Premier Ministre au Laos est un signe de pragmatisme, Nation (Bangkok), le 1er avril 2001. [2] Selon une étude entreprise par la Banque mondiale, la Banque de Développement Asiatique (ADB) et le gouvernement Lao, environ 39 % de la population Lao vit sous le seuil de la pauvreté. Pour une analyse de l'évolution et de la géographie de la pauvreté au Laos, voir Fighting Poverty through Human Resource Development, Rural Development and People’s Participation, Rapport du Gouvernement Lao à la Septième Table Ronde (Vientiane, novembre 2000) et Gun Alm Stenflo, Poverty Profile of Lao PDR (Vientiane: Statistics Sweden and Laostat 1999:2 ). [3] Atteindre une autosuffisance en riz au Laos est problématique pour deux raisons principales. D'abord, le Laos n'a pas un avantage comparatif dans la production de riz par rapport à la Thaïlande et au Viêt-nam. Deuxièmement, le Laos n'a pas de marché intégré du riz avec des flux commerciaux suffisants entre les régions excédentaires et déficitaires, ce qui est nécessaire pour garantir l'autosuffisance à l’intérieur du pays. Sur le secteur de riz au Laos, voir Yves Bourdet, Emerging Rice Market in Laos ? (Country Economic Report 2000:7, Swedish International Development Cooperation Agency). [4] Pour une analyse des déterminants des disparités entre les provinces au Laos, voir Yves Bourdet, The Economics of Transition in Laos – From Socialism to ASEAN Integration, Edward Elgar, 2000, Cheltenham et Northampton, chapitre 7. [5] La fongibilité de l'aide étrangère se réfère à la possibilité donnée à un pays bénéficiaire de transférer des ressources du secteur (ou projet) qui reçoit l'aide vers à d'autres secteurs (ou projets). L'argument de fongibilité suggère que dans certains cas l'aide étrangère ne finance pas les projets, pour lesquels elle est apparemment destinée et qui auraient été réalisés de toute façon, mais d'autres projets à la place. [6] Pour plus de détails, voir ADB, Country Strategy and Program (2002-2004) : Lao People’s Democratic Republic (Manila : ADB, 2001). |